Après douze années à la tête de la Société de vénerie, notre ami Pierre de Roüalle a passé le fouet voilà quelques jours. C’est, sans conteste, une page qui se tourne – et non pas un livre qui se ferme –, tant il est vrai que sa présidence a été marquée par les circonstances et par les actions qu’il a engagées et menées. Écrire que Pierre de Roüalle est arrivé à un moment délicat pour la chasse et la vénerie en particulier est l’évidence même. Un peu plus de dix ans, c’est l’épaisseur d’un trait en Histoire, cela semble une éternité pour le monde cynégétique. Presque l’ancien monde contre le nouveau. Tu nous avais dit, tu avais écrit que chasser allait devenir « un acte militant » : mots prémonitoires face aux attaques incessantes et
de plus en plus virulentes de la radicalité écologiste et de son bras armé, l’écoterrorisme, aux outrances du bien-être animal, à la contestation permanente de la légitimité de la vénerie. Bref, une rupture de civilisation réclamée certes par une minorité, mais qui bénéfice d’un traitement
médiatique souvent complaisant, et de réseaux sociaux où le discernement n’est pas vraiment la règle. Face à cette déferlante, où la chasse a été rangée dans le ‘‘camp du Mal’’, le défi était immense – et il l’est toujours – pour la vénerie, car « elle est un marqueur évident dans le combat que mènent nos opposants ». Avec calme, tu as répondu inlassablement à nos adversaires, tu as entretenu avec constance les liens avec les veneurs (notamment lors de ton ‘‘Tour de France’’ au cours de l’été 2020) et le monde de la chasse, avec un objectif : « évoluer sans se renier ». Le défi était de taille face à cette accélération de l’histoire ; et tu l’as relevé. Plus encore, tu as saisi que la vénerie « ne peut pas aller à contre-courant de la nouvelle exigence sociétale à l’égard du bien-être animal ». Le monde cynégétique ne doit pas se méprendre sur tes propos, qui ne signifient nullement baisser la tête mais montrer l’exemple en étant encore plus exigeant envers le bien-être des chiens et des chevaux. Évolution, encore, quand tu t’interroges sur la légitimité du courre du cerf en forêt péri-urbaine, car « l’actualité rattrape inexorablement ces équipages et, à chaque fois, fragilise l’édifice ». Aussi, à la question : « pourra-t-on continuer à chasser à courre ? », tu préfères répondre : « à quelles conditions pourra-t-on continuer ? »

C’est tout l’enjeu qui attend ton successeur, Pierre-François Prioux, maître d’équipage du Rallye Tempête. Nous ne pouvons que le soutenir dans cette présidence qui s’annonce délicate car, si la vénerie a traversé d’autres crises, celle-là est la plus pernicieuse, parce qu’elle touche les esprits.