À Paris, Philippe Robert et Opus, son münsterlander, accueillent les amateurs d’art animalier. Située quai de La Tournelle, sa boutique demeure l’un des très rares cabinets de curiosités parisiens. Ici, on chine une figurine Vertunni, un fusil Chassepot comme une gravure de Blaise Prud’hon.
Votre parcours professionnel se confond-il avec l’histoire de cette boutique ?
Pas du tout. En fait, avec le recul, je m’aperçois que ma vie professionnelle ressemble à une mosaïque. Après un diplôme de Sup de Co Amiens, j’ai travaillé dans différents domaines de la restauration. J’ai même monté quatre bars à vin. Quand un oncle me proposera de le seconder dans son activité industrielle à Givet, dans les Ardennes, je n’hésiterai pas un instant. Hélas, au bout de quinze ans, l’entreprise de chimie que je dirige est touchée de plein fouet par la crise de 2008. Ce sera un crève-coeur de quitter les Ardennais. Proche de la soixantaine, il n’est alors pas facile de retrouver un job ! Pourtant, pendant deux ans et demi, j’aurai la chance d’exercer un métier merveilleux. Durant cette période, les propriétaires de l’abbaye de Fontenay, en Bourgogne, m’ont confié sa destinée. Puis, un beau jour, j’ai décidé de choisir ‘‘ma fin de carrière’’, si j’ose dire. C'est-à-dire de vivre de mes deux grandes passions : la collection des souvenirs militaires, depuis l’âge de 14 ans ; et une passion plus récente, puisqu’elle date d’une trentaine d’années, ce que l’on nomme les beaux-arts de la chasse. Pour associer les deux, la vitrine d’une boutique s’est imposée tout naturellement.
Vous avez donc créé la boutique À Diane et Mars…
Pas exactement. J’ai d’abord cherché, sans succès, un emplacement au nom prédestiné, rue de Bellechasse. Ça sonnait bien. Avant de me souvenir de l’adresse de Jean-Pierre Stella, ici même, Aux Soldats d’Antan, rebaptisé à mon arrivée en 2017 À Diane et Mars. (Jean-Pierre Stella habite désormais les Landes. Excellent tireur au fusil de chasse, il animera des années durant les compétitions de tir au bois de Boulogne. Dans les années 1980, il créa un parcours de chasse à La Marsaudière, en Seine-et-Marne, qui fut l’un des plus beaux stands de l’histoire des tirs.) Comme j’ai toujours chiné, étant plus jeune, j’avais vendu quelques objets à Jean-Pierre. Pas acheté, parce que, quand on est, comme moi, chineur-collectionneur dans l’âme, on cherche son bonheur aux Puces, porte de Vanves. Jean-Pierre acceptera de me céder sa boutique. Si Aux Soldats d’Antan proposait des figurines, des objets d’ordres de chevalerie, des décorations et quelques armes prestigieuses, les objets À Diane et Mars sont un peu différents. Ainsi, au nom Mars correspondent maintenant beaucoup de souvenirs militaires datant de la Première Guerre. C’est ma période de prédilection. Très souvent, ces reliques ont un rapport avec l’aéronautique militaire, des entoilages, des souvenirs d’as de l’aviation…
D’où vient cette passion des souvenirs militaires ?
En partie, je l’explique avec ce que je nomme le syndrome Astérix. Ma génération est née avec le petit guerrier gaulois. Sur de nombreuses planches d’Albert Uderzo, Astérix et Obélix rentrent de la forêt des Carnutes avec un empilement de casques romains. Peut-être ai-je voulu imiter ‘‘nos ancêtres’’, lorsque je meublais de casques à pointes ma chambre d’adolescent, sans la bénédiction familiale. Loin s’en faut. Depuis, j’ai continué. De plus, si on rencontre beaucoup de militaires dans ma famille, aux générations précédentes, la demeure familiale n’avait conservé aucun de leurs bibelots. En collectionnant, par exemple, ce drapeau jonquille et bleu (Philippe désigne de la main un fanion du 11e BCA à la cimaise), je rendais en quelque sorte les honneurs à ceux que je n’avais pas connus.
Diane, la chasse : quel est alors le trait d’union avec Mars ?
Les armes font le trait d’union entre les souvenirs militaires et la chasse. Quand, très souvent par détournement après un conflit, une arme de guerre officie à la chasse. Le fusil Mauser 98, devenu carabine de chasse en changeant de destination, en est l’un des exemples marquants.
Êtes-vous chasseur ?
Dans ma famille, même en remontant à deux générations, on ne trouve pas
la moindre trace d’un chasseur. À mes yeux, la recherche d’une bécasse avec Opus, mon épagneul, comme l’approche d’un isard en Ariège, symbolise nos derniers espaces de liberté. En vivant ces émotions, l’homme peut retrouver l’instinct originel. La chasse est d’ailleurs le sujet de la première expression artistique de l’humanité. Je profite de l’occasion que vous m’offrez pour remercier mon mentor, Blaise Prud’hon, de m’avoir conseillé la lecture de René Chambe, lui qui sut si bien retranscrire les plaisirs de la chasse dans Propos d’un vieux chasseur de coqs.
Vous citez Blaise Prud’hon. Qui sont vos autres artistes de cœur ?
Nous venons de clore l’exposition ‘‘Entre chien et loup’’ inaugurée le 28 novembre dernier. Une sélection d’objets anciens, comme des boutons de vénerie ou des dagues, présentés parallèlement aux œuvres d’artistes contemporains, a servi à illustrer cette exposition. Une gravure de Blaise représentant la tête d’un loup illustrait le carton d’invitation. En plus de Blaise Prud’hon, cinq autres artistes animaliers contemporains s’exposent en permanence À Diane et Mars. Taisiia Cherkasova, Julie Salmon, Catherine Farvacques, Patrick Allain et François Beaurin-Berthélemy. Leurs œuvres sont à voir ou revoir par l’intermédiaire du site À Diane et Mars. C’est une réelle fierté d’être le dépositaire de leur confiance.
Contact
Tél. : 01.46.33.40.50 – 07.87.68.69.92
www.adianeetmars.com et www.salondelachasse.com