Éleveur de gibier dans le Sud-Est, Jean-Christophe Chastang est le président d’InterProchasse depuis 2021. Il en rappelle les missions et les nouveaux axes de développement.

InterProchasse a été fondé en 2007. Quelles sont ses missions ?

La finalité d’InterProchasse est de défendre les intérêts économiques de la filière ‘‘chasse’’ en réunissant ceux qui la font, et de valoriser l’image de la cynégétique auprès du grand public. InterProchasse se donne notamment pour mission de promouvoir la viande de gibier, viande qui ne l’est pas encore assez en France, et qui, pourtant, fait partie intégrante de notre culture culinaire, par ses qualités gustatives et nutritionnelles. Si certains acteurs de terrain avaient pu être sceptiques quand le projet de cette interprofession avait été lancé, tous sont aujourd’hui unanimes, car chacun a conscience que la chasse est attaquée de toute part. Fédérer les forces est donc une nécessité impérieuse. Ce qu’InterProchasse s’emploie à faire par ses actions de communication et de défense et promotion de la filière économique cynégétique.

Quelles sont les conditions requises pour en faire partie ?

Il faut relever d’une organisation syndicale ou professionnelle représentative selon les critères réglementaires. Actuellement, Inter- Prochasse est composée de 11 membres : on y trouve des fabricants d’armes, des armuriers, des éleveurs de gibier, la Fédération nationale des chasseurs, la centrale canine, etc.

Parmi les nombreuses initiatives mises en place par InterProchasse, il y a ‘‘Les chasseurs ont du coeur’’. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’une action née, en 2013, de la rencontre entre notre organisme et la Fédération française des banques alimentaires. L’idée est de permettre de préparer quelque 20 000 repas destinés aux plus démunis et servis pendant les fêtes, à partir de 5000 terrines de faisans prêts à être cuisinés et que nous fournissons. Cette opération, qui a lieu sur toute la France, au sein de différentes villes chaque année, est à nos yeux extrêmement importante. Elle est un cas pratique d’action caritative concrète ; elle montre que le monde de la chasse se soucie des difficultés rencontrées au quotidien par des personnes qui, parfois, n’ont pas accès à ce que la nature peut offrir de meilleur. Ces moments de partage ont aussi été pour nous l’occasion de tisser des liens très forts avec les équipes de la Banque alimentaire, dont je ne remercierai jamais assez le dévouement.

On songe aussi à la campagne ‘‘Le gibier, y avez-vous pensé ?’’, mise en place en 2019. Comment a-t-elle été reçue ?

Très bien ! L’idée d’InterProchasse est de faire découvrir le gibier au grand public en favorisant le retour de la venaison sur les étals de quelque 300 boucheries volontaires. Nous y avons déposé un kit destiné à faciliter
son déploiement sur le terrain, kit qui contient notamment soixante exemplaires d’un livre de recettes intitulé Le gibier, y avez-vous pensé ?. Ces livres, réalisés par plusieurs blogueurs influents, sont à chaque édition parrainés par des chefs médiatiques comme Jean-François Piège, Guillaume Gomez ou encore Michel Roth. Cet ouvrage a rencontré un franc succès auprès des bouchers mais aussi des armuriers chez lesquels nous le déposons chaque année pour qu’il soit offert au public. L’idée est d’attirer des populations plus jeunes et plus urbaines en essayant de briser les a priori sur la chasse. L’opération est reconduite en 2023.

InterProchasse apporte son soutien financier à un projet de recherche visant une gestion durable du petit gibier. Quels sont ses contours ?

Baptisé GibAdapt, ce projet est le fruit d’un partenariat entre l’Université de Rennes, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), l’Institut méditerranéen du patrimoine cynégétique et faunistique (IMPCF) et le Syndicat des sélectionneurs avicoles et aquacoles français (SYSAAF), le Syndicat national des producteurs de gibiers de chasse (SNPGC) et les Fédérations départementales des chasseurs de la Drôme et de Vendée. Il vise à étudier – d’abord chez la perdrix rouge, puis, à terme, chez le faisan – l’influence de l’environnement prénatal et postnatal sur les capacités d’adaptation du gibier d’élevage aux conditions de la vie sauvage, après qu’il a été remis en nature. Le but est d’identifier les facteurs qui permettent de renforcer les comportements de survie et de reproduction chez ces oiseaux, afin de pérenniser le repeuplement.

Au reste, si nous avons décidé d’apporter notre soutien financier à cet ambitieux projet, c’est qu’il nous paraît essentiel de renouer avec ce qui faisait, jadis, l’essence de la chasse française : la présence du petit gibier – laquelle a été largement supplantée par celle des grands animaux.

Quels sont les défis qui attendent la chasse française, et quel rôle InterProchasse peut y jouer ?

La chasse française doit se projeter à la fois sur les attentes sociétales de nos concitoyens sur notre passion, et sur celles des cynégètes eux-mêmes : cela concerne la sécurité, le partage intelligent de la nature, le délicat dossier des munitions à plomb, la gestion des populations de grands animaux, la préservation de la biodiversité… Au niveau d’InterProchasse, nous agissons par exemple pour la défense des filières (d’élevage de gibiers notamment), et de l’ensemble des métiers de la chasse. Sur ce dernier point, je pense évidemment aux filières d’artisanat dans le secteur de l’arquebuserie, de la gravure… Il faut encourager la formation des jeunes. Sur un autre plan, InterProchasse continue d’être l’un des acteurs de la restauration des milieux. C’est ainsi qu’à la suite des dramatiques incendies en Gironde de 2022, en liaison avec la fédération départementale, nous avons lancé un plan de trois ans sur trois territoires d’une superficie de plus de 14 000 hectares, qui comprend la remise en nature de 500 faisans, l’implantation de cultures à gibier… Des actions qui profiteront à l’ensemble de la biodiversité.