C'est sans doute une scène que l’on ne verra jamais dans l’hémicyclique du Palais Bourbon. Qu’on en juge : à la fin du printemps, à la suite d’une pétition menée par le groupe Wild Justice, un débat est intervenu devant la Chambre des Communes sur la question de savoir s’il fallait interdire ou non les battues de grouses en Angleterre (driven grouse shooting ban). Déjà en 2016, le Parlement s’était penché sur la question. Car, selon Wild Justice, les battues auraient un « effet désastreux » sur l’environnement, en raison du trop grand nombre d’oiseaux tués par ce mode de chasse, et de l’atteinte à la biodiversité provoquée par les brûlages des moors chaque année (en effet, chaque domaine brûle entre 15 et 20 % du moor afin de regénérer la bruyère, nourriture exclusive de la grouse, en particulier les jeunes pousses, favorisant ainsi une belle densité)… Pour se faire une idée la plus juste possible, et même si l’issue du vote ne faisait pas de doute, les parlementaires ont demandé un rapport à James Crabbe, un professeur de biochimie de l’université de Northampton, qui plus est non issu du monde de la chasse. Le rapport de son équipe, qui fait tout de même 242 pages, conclut presque à un… plaidoyer en faveur des battues de grouses. D’abord, d’un point de vue économique, car, note-t-il, dans ces régions pauvres, ce sont des ressources non négligeables. Ensuite, du point de vue écologique, ce mode de chasse, par les aménagements qu’il nécessite, profite à l’ensemble de la biodiversité, qu’elle soit animale ou végétale. Sur la question spécifique du brûlage, accusé de provoquer une émission de gaz carbonique, le professeur James Crabbe a démontré que si, dans un premier
temps, il y avait bien émission, dans un deuxième temps, les gaz étaient réabsorbés par des dizaines de milliers d’hectares de bruyère environnants. Enfin, le rapport a souligné que ces battues apportent un lien social très fort (peut-être le sujet « le plus crucial ») au sein des populations locales. Ce rapport lu pendant près d’une heure a été applaudi pendant près de dix minutes. L’issue du vote ne laissait planer aucun doute : la pétition a été rejetée à l’unanimité, moins une voix.