Il est des princes et des rois qui ont laissé des traces cynégétiques fortes et visibles, d’autres ont été davantage dans l’ombre sur le sujet, ce qui ne signifie pas pour autant qu’ils n’en étaient pas enférocés. Albert Ier de Monaco relèvent de cette engeance-là, jusqu’à ce que ce solide ouvrage de Jean-Yves Giraudon ne le mette en pleine lumière (voir Jours de Chasse n°89). Jusqu’à présent, en effet, seul Georges Benoist (garde de la famille Rothschild sur leur domaine des Vaux-de-Cernay), dans Grandes chasses, grands fusils, avait laissé un long et vibrant hommage du monarque, bien davantage connu et reconnu comme navigateur, explorateur, océanographe. Au vrai, comme le montre Jean-Yves Giraudon, la chasse fut aussi la grande affaire de sa vie puisqu’elle l’occupa pendant plus de soixante ans. Ce fut non un simple divertissement mondain, mais une passion ancrée au plus profond de lui. Avec la pêche, il estimait que la chasse était la plus formatrice des activités sportives, fidèle en cela à la pensée antique. De fait, il chassa beaucoup et partout, en France comme à l’étranger (son tableau de chasse l’atteste mais, s’il est impressionnant, il reste bien en-deçà des grands fusils de l’époque) ; cependant, et c’est en cela qu’il est un précurseur, il avait saisi que la chasse ne pouvait aller sans la préservation des espèces. Il avait compris toute l’ambivalence du chasseur, être instinctif autant que civilisé, militant sans relâche pour une chasse vertueuse (c’est-à-dire difficile, exigeante), et, par là même, durable. Bref, un ouvrage – richement illustré – à méditer à l’heure où la cynégétique est mise à mal.
Montbel, 326 pages, 39 €.