Lorsqu’on referme ce livre, c’est un sentiment de malaise qui domine. D’abord, par le style de narration choisi, le travail à quatre mains livre une impression de décousu, quand ce n’est pas de confusion, confusion entre un récit qui veut coller au plus près de la réalité, et une part de roman, toujours imprudente et délicate. Ensuite, parce que l’affaire Pilarski – car c’est d’elle qu’il s’agit – est toujours en cours d’instruction. Une affaire dramatique qui a tourné au procès de la chasse à courre pendant des mois et des mois ; or, c’est justement et précisément l’un des auteurs – Matthias
Tesson – qui avait mis le feu aux poudres. Souvenons-nous : en novembre 2019, Élisa Pilarski, enceinte de six mois, est retrouvée morte, scalpée, en forêt de Retz, dans l’Aisne, avec, à ses côtés, le chien de son compagnon Christophe Ellul, Curtis, pitbull de son état. Très vite, à la suite du témoignage de Christophe Ellul (lequel accuse la meute de l’équipage du Rallye La Passion qui découplait,  ce jour-là, dans ce massif, face à la caméra de BFM TV, et interrogé par Matthias Tesson), c’est à un lynchage médiatique que l’on assiste. Qu’il s’agisse des antichasse, des animalistes, de nombreux médias… l’occasion est inespérée de se ‘‘payer’’ la chasse, les chasseurs, les veneurs, sans recul, sans prudence. Même au début de l’enquête, le procureur abonde dans ce sens, en laissant entendre que… Peu à peu, mois après mois, analyses génétiques après analyses génétiques des chiens de l’équipage et de Curtis, le déroulement du drame se précise : c’est bien Curtis qui a attaqué et tué Élisa Pilarski. Avec les deux auteurs, nous partageons la vie d’Élisa, de sa famille, de son compagnon et ses multiples mensonges, les folies animalistes et leurs dérives complotistes… On pourrait
presque se contenter de ce récit. Pourtant, les auteurs semblent avoir oublié le rôle néfaste d’une grande partie de la presse, qui a pris pour argent comptant la version accusant nommément les chiens de l’équipage. Ils ne se posent pas plus la question du silence des associations animalistes et antichasse, lesquelles, une fois que la vérité a été établie, n’ont jamais fait amende honorable. Comme l’on dit en matière judiciaire, il y a des zones d’ombre dans l’instruction.

Le Cherche Midi, 279 pages, 20,90 €.