Disons-le tout net : Beauvais de Saint-Paul n’a pas le talent et la verve d’un Foudras, d’un Blaze ou d’un d’Houdetot pour conter la chasse. Il n’en demeure pas moins que nous tenons là un solide témoignage de ce que fut la chasse, à courre ou à tir, en Mayenne, dans le Maine, la Sarthe, dans ce XIXe siècle considéré, à plus d’un titre, comme l’âge d’or non seulement de la vénerie mais de toute la cynégétique : les chasseurs étaient peu  nombreux, l’agriculture n’avait pas subi sa révolution, le gibier était pléthorique… Il est bien sûr question du loup, encore en densité non négligeable à cette époque (les louvetiers en détruisaient 1200 à 1500 chaque année), de sa chasse (« la plus belle, la plus savante, la plus difficile et la plus rude ; elle exige des hommes vigoureux, infatigables, tenaces, expérimentés »)… Il rappelle les ravages qu’il causait (sur les troupeaux, sur les chiens), la rage qui sévissait encore (jusqu’à l’apparition du vaccin en 1885). Beauvais de Saint-Paul brosse le portrait de cynégètes intrépides, à la limite du fanatisme (dont certains sortis tout droit du XVIIIe) ; des portraits
quelquefois, reconnaissons-le, un peu répétitifs. Il est question de chasses aux sangliers (dont certains proprement monstrueux), dont l’auteur se plaint qu’ils devenaient de plus en plus rares (que dirait-il aujourd’hui !), de blaireaux, de laisser-courre homériques, parsemés d’anecdotes savoureuses, de chiens hors du commun (dont monsieur Trimm, « assez aristo, qui détestait les gens mal mis et mal élevés »), de dîners gargantuesques, de digressions sur les « grandes battues », qui n’ont pas sa préférence (« Elles servent à montrer l’adresse des tireurs et à leur faire la main : c’est là leur justification »). Bref, « il faisait bon d’habiter la campagne »