Que feraient, que seraient nos Verts sans la chasse ? Espèce de marotte, ils y reviennent toujours, trop heureux d’aller tous dans la même direction quand, sur tant d’autres sujets, leurs avis et intérêts divergent. Osons le dire : les écologistes français aiment les chasseurs – d’un amour certes peu banal, presque vénal, mais bien réel. L’opposition à la chasse est un principe de cohésion tel que l’on subodore qu’ils ne souhaitent pas vraiment la faire interdire… Elle leur est si utile ! Vitale, même. Pourquoi donc ? Parce qu’elle leur permet de donner le change. Un seul exemple : alors qu’une partie de la France grelotte, que l’augmentation du prix de l’énergie risque d’être fatale à certains professionnels, etc., nos bons petits décroissants-écologistes-écocitoyens ne tiennent pas trop à évoquer leur lutte ardente et très ancienne contre le nucléaire, dont la France, hier encore, était un fleuron. Il est vrai que certains grands médias ne les harcèlent pas de questions à cet égard… Un accident de chasse, ou la sempiternelle invocation du « puissant lobby des chasseurs » comme symptôme d’une démocratie confisquée, cela est nettement plus efficace pour tenir en haleine le quidam. En sorte que si la détestation de la chasse est fort commode, elle constitue, pour les Verts, un véritable
refuge qui les protège de leurs propres vicissitudes politiques.

Une passion très ‘‘utilitaire’’ qui est, une fois de plus, sortie du bois. Le 29 novembre dernier, en effet, trois propositions de loi liées au ‘‘bien-être animal’’ ont été enregistrées par la présidence de l’Assemblée nationale. Passons sur deux d’entre elles, qui ne concernent pas directement la chasse, et arrêtons-nous sur la troisième : la PPL n°535, intitulée « Pour une chasse plus respectueuse de la nature et de ses usages ». Présentée par vingt députés écologistes-Nupes, dont Sandrine Rousseau et Julien Bayou, cette PPL réclame pêle-mêle : l’interdiction « de la chasse les week-ends, les jours fériés et les vacances scolaires pour que, enfin, nous retrouvions un accès libre à la nature et à nos forêts [on notera la mention du possessif ‘‘nos’’] » ; celle « de la chasse à courre et [des] pratiques de chasse équivalentes » ; de
« la vénerie sous terre, qui implique d’importantes souffrances pour l’animal […], ainsi que [des] chasses dites traditionnelles telles que la chasse à la glu, à la tendelle, à la matole, aux pantes, la chasse tenderie aux vanneaux, la chasse tenderie au brancher » ; de « la délivrance et [du] renouvellement d’attestations de meute » ; enfin, de « la chasse en enclos et [de] ses différentes pratiques, en passant notamment par l’interdiction définitive de l’agrainage et l’affouragement ». Au bout de ce pensum, une conclusion : chasse « respectueuse » signifie… plus de chasse du tout.

Inutile de relever l’indigence d’une telle proposition de loi, qui contreviendrait au droit de chasser, au droit de propriété et à la liberté de transmission. Ce qui nous interpelle, en revanche, c’est la fougue presque adolescente des signataires. Nos écologistes sont comme enivrés de l’existence des chasseurs. Est-ce l’expression d’un amour à rebours, ou d’un opportunisme trivial ? Les deux, sans doute. Lucky Luke ne cessera jamais de poursuivre les Dalton ; le Coyote, Bip Bip ; Tom, Jerry… Qu’adviendrait-il si les Dalton, Bip Bip et Jerry disparaissaient ? Lucky Luke ne tirerait plus que sur son ombre ; le Coyote s’ennuierait ; et Tom serait désormais aussi drôle qu’a été brillant le discours de réception du Nobel par Annie Ernaux…

Les chasseurs ne sont pas des victimes, mais les cibles privilégiées de tireurs idéologiques qui seraient bien en peine de les voir périr. Telle est la leçon de cette énième tentative d’annihiler notre passion : qu’il s’agisse de ces députés ou d’autres élus, les écologistes français ont, décidément, grand besoin des chasseurs… pour faire oublier leurs égarements !