L’expert Pierre Aussedat répond à la demande des particuliers qui veulent allier sécurité du capital et attrait fiscal, mais aussi aux institutionnels attirés par le label bas carbone en forêt. Décryptage.

Quelles conséquences peut-on tirer de la crise sanitaire sur le marché des forêts ?

La crise sanitaire que traverse le marché de la forêt est celle du réchauffement climatique. Son impact a plus d’incidences que la crise du Covid. Les conséquences sont douloureuses puisque toutes les essences souffrent, soit du stress hydrique, soit des insectes ravageurs, avec un dépérissement important observé sur les hêtres, les frênes, les résineux… Les conséquences du réchauffement climatique sont parfois pires que celles de la tempête de 1999. De nombreux arbres meurent en forêt sans que cela
alerte les médias. Les scolytes, ces insectes qui font périr les épicéas en 15 jours, ont entraîné la disparition de 30 000 hectares de résineux en France, et davantage encore en Allemagne.

Malgré ces difficultés, les particuliers et les investisseurs sont toujours plus nombreux à vouloir investir dans la forêt…

Sans doute cherchent-ils à s’impliquer dans la lutte contre le réchauffement climatique et, en même temps, à mettre leur patrimoine à l’abri. Le risque de retour de l’inflation et de hausse des taux d’intérêt limite les solutions de placement traditionnel. Les épargnants cherchent des placements robustes et la forêt en fait partie. En prime, les incitations fiscales, considérées jusqu’ici comme la cerise sur le gâteau (dont l’exonération d’IFI ou de droits de succession pour les ¾ de la valeur de la forêt, NDLR), constituent un argument de poids tant l’enjeu fiscal peut être important. Par exemple, lorsque vous vendez une forêt d’une valeur de 3 millions d’euros et que l’économie d’impôt atteint au total 1 million pour l’acquéreur.

Comment bien choisir son investissement ?

Tout dépend de l’actif que l’on souhaite acquérir. L’approche traditionnelle consiste à acquérir une forêt pour la production de bois. Avec la multiplication des incidents climatiques, il faut être très vigilant sur la qualité des sols, l’emplacement, la pluviométrie, l’altitude ; et éviter les sols superficiels… Pour chaque parcelle, il convient de calculer la réserve utile, c’est-à-dire la capacité du sol à stocker de l'eau, élément déterminant pour la croissance des arbres.

De plus en plus d’acquéreurs institutionnels investissent pour valoriser la biodiversité et le stockage du CO2. De nombreuses entreprises veulent améliorer leur empreinte carbone et dirigent les financements vers la forêt privée. Le label bas carbone permet de quantifier un stock de carbone en forêt et de le financer. Il s’agit d’un véritable levier de croissance qui permettra demain au propriétaire de diversifier ses revenus. La capacité à stocker du carbone vient naturellement renforcer le prix des forêts. Au final, entre les institutionnels, les particuliers toujours plus nombreux, les professionnels du bois qui cherchent à sécuriser leurs approvisionnements, et les entreprises qui cherchent à compenser leurs émissions, la hausse de la demande se répercute sur les prix. Selon les statistiques officielles de la SAFER, les prix de la forêt augmentent lentement de 1 à 2 % par an. En réalité, une parcelle achetée en l’an 2000 à 4000 euros l’hectare a souvent vu son prix être multiplié par trois ou par quatre. Mais à 15 000 euros, voire à 20 000 euros l’hectare, les prix en France sont encore très bon marché par rapport au reste des forêts d’Europe.

Renseignements : cabinet@pierreaussedat.com