L’un des grands défis de la chasse des migrateurs du XXIe siècle sera d’établir des données les plus fiables possibles sur l’état des populations, tant il est vrai que nos oiseaux traversent frontières et continents, et ne subissent pas la même pression de chasse d’un pays à l’autre. C’est tout le sens des travaux scientifiques menés par la Fondation François Sommer, l’Office français de la biodiversité (OFB) et la Fondation de la Tour du Valat (installée en Camargue, et dont l’objet est la conservation des zones humides). En effet, depuis le début des années 2000, ces organismes mènent des recherches dans la région des Grands Lacs, en Afrique, et particulièrement au Soudan, au Tchad et en Tanzanie, sur les flux migratoires et les zones d’hivernage. Rappelons qu’en association avec des chercheurs locaux, ces travaux sont menés dans le cadre de l’Aewa (l’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie est un traité intergouvernemental destiné à la conservation des oiseaux d’eau migrateurs et de leurs habitats en Afrique, en Europe, au Moyen-Orient, en Asie centrale, au Groenland et dans l’archipel canadien) et du Ramsar (un site Ramsar désigne une « zone humide d'importance internationale » inscrite sur la liste établie par la Convention de Ramsar). Le maintien des zones humides est en effet capital, non seulement pour la conservation des migrateurs, mais aussi pour la subsistance des populations locales car pour elles les oiseaux sont une ressource alimentaire périodique. D'autre part, ce type de recherches est d’une importance cruciale lorsqu’on sait que l’UICN classe tel ou tel oiseau seulement par espèce, alors qu’il faudrait surtout établir un état des populations par voies de migration ; or, ce classement sert aux écologistes
les plus radicaux pour réclamer l’interdiction de la chasse de telle ou telle espèce. Après avoir vu le film diffusé le 21 avril dernier et consacré à ces travaux, on reste impressionné par les densités proprement ahurissantes de certains canards comme le pilet et la sarcelle d’été (pourtant toujours classée vulnérable par l’UICN). Cela est rassurant. On ne peut que souhaiter la poursuite de cette coopération internationale qui, on le devine, est sujette à l’instabilité politique, hélas chronique, de l’Afrique. C’est pourquoi la formation des populations locales est l'un des grands enjeux de ces suivis. Ainsi, la Fondation Sommer a le projet de trois grandes écoles de faune en Afrique : Garoua (Cameroun), Kenya Wildlife Service Training Institute (Kenya) et Mweka (Tanzanie).