La cohabitation entre l’ours et l’homme est-elle encore possible dans les Pyrénées ? La question est à nouveau brutalement posée à la lumière de l’accident survenu le 20 novembre. En effet, d’après les premiers éléments de l’enquête, lors d’une battue de grands animaux à Seix, dans le département de l’Ariège, un chasseur de 70 ans est attaqué par une ourse suivie de ses petits. L’animal le blesse grièvement, le traîne sur une trentaine de mètres, le chasseur fait feu à deux reprises, à telle enseigne que l’ourse est retrouvée morte à quelques dizaines de mètres de l’accident. Il ne doit son salut qu’à la présence dans la battue d’un pompier volontaire… Hospitalisé, ses jours ne sont plus en danger. Pour les bergers, les chasseurs, ce drame illustre, une fois de plus, que l’ours n’a plus sa place dans la chaîne pyrénéenne. Les pro-ours n’en démordent pas, mettant en avant, dans ce cas précis, que la battue a eu lieu en partie dans une zone interdite à la chasse…
Que faut-il en penser ? Loin le temps où l’ours errait dans toute la France. Recherchant la tranquillité, fuyant l’homme, il s’est réfugié par la force des choses dans les massifs alpins (d’où il a disparu ; le dernier fut tué en 1921) et pyrénéens. Dans cette région, il s’était lui aussi peu à peu éteint (il n’en restait que 5 en Béarn en 1995). D’où la volonté de François Mitterrand et de l’Union européenne de réintroduire des ours slovènes : 11 seront relâchés entre 1996 et 2018. C’est sans conteste une réussite car, aujourd’hui, la population d’ours est estimée à 64. Une présence qui n’est pas vraiment du goût des éleveurs, des bergers et des chasseurs qui mettent en avant le manque de concertation sur les lâchers (ainsi, ils sont intervenus à des endroits, non où il y en avait encore, ce qui aurait pu être compréhensible, mais là où il n’y en avait plus), et le fait que, s’il était en voie d’extinction, c’est qu’il y avait bien une raison. De leur côté, les pro-ours soutiennent qu’il faudrait davantage de réintroduction, pour la reconquête de la biodiversité.
Comme tous les animaux sauvages, l’ours brun, qui, en dehors de l’homme, n’a pas d’ennemi, n’est pas un destructeur patenté au point de mériter que l’on décrète sa mort. Il n’attaque pas l’homme, sauf blessé ou avec ses petits (car il se sent menacé). Or, plus l’activité est importante, plus les risques de confrontation le sont. Souvenons-nous des accidents en 2004 quand l’ourse Cannelle avait été tuée. N’oublions jamais qu’en France, l’ours était chassé parce que justement il posait des problèmes… Aujourd’hui, les Pyrénées ne sont-elles pas trop étroites, trop fréquentées ? Elles n’offrent pas l’immensité de la Russie, de l’Alaska, du Canada. L’ours est-il compatible avec le tourisme, la sylviculture, le pastoralisme ? Les politiques auront-ils la volonté de répondre à ses questions ?