De même qu’il faut, paraît-il, manger cinq fruits et légumes par jour, de même est-il conseillé de rire quotidiennement. S’il est hors de doute que les militants de PETA (Pour une éthique dans le traitement des animaux) appliquent le premier de ces préceptes à la lettre, on peine à imaginer que l’esprit du second leur soit familier… Cela dit, il faut admettre que, par un tweet en date du 26 janvier dernier, l’association a fourni au reste du monde l’occasion de bien se détendre les zygomatiques. « Les mots, est-il indiqué dans ce ‘‘gazouillis’’ (tweet, en anglais), peuvent créer un monde plus inclusif, ou perpétuer l'oppression. Utiliser un animal comme insulte renforce le mythe selon lequel les humains sont supérieurs aux autres animaux et qu’il est justifié de les avilir. Levez-vous pour la justice en rejetant le langage suprématiste. Utiliser les animaux comme insultes fait perdurer le spécisme ». Et d’offrir, dans la langue de Shakespeare, quelques exemples – « poule mouillée », « rat », « serpent », « cochon » et « paresseux » – renvoyant tous, par ‘‘métaphore’’, à des comportements humains peu flatteurs… Sans être une plaisanterie, l’initiative a donc beaucoup amusé. Mais elle a aussi agacé certains adeptes du véganisme qui – dans un éclair de lucidité d’autant plus méritoire qu’il ne leur est guère coutumier – ont demandé à PETA de retirer ce tweet pourtant si bénéfique au moral de chacun. Plus sérieusement, il est permis, sur la base d’une telle publication, de souligner un élément central de la stratégie mise en œuvre par l’antispécisme pour pénétrer les consciences : cet élément consiste, ni plus ni moins, à dé-construire et la langue et le vocabulaire en les passant au crible d’une éthique particulière, dans le but, tout d’abord, de les vider de leur substance culturelle et historique, et, ensuite, de substituer à la réalité qu’ils dé-signent une autre réalité, plus conforme aux principes moraux de l’idéologie antispéciste. En s’attaquant aux mots, on n’attaque pas seulement une manière de penser, on attaque la chose elle-même. Technique de plus en plus utilisée de nos jours, et qui ne prête pas à sourire, elle.