Le long feuilleton relatif à la tourterelle des bois continue. En effet, un arrêté du ministère de la Transition écologique paru le 19 août au Journal officiel énonce que, « jusqu'au 30 juillet 2022, la chasse de la tourterelle des bois (Streptopelia turtur) est suspendue sur l'ensemble du territoire métropolitain ». L’an dernier, saisi par plusieurs associations – dont la LPO –, le Conseil d’État avait déjà rendu une décision similaire, en cassant un arrêté du même ministère qui autorisait alors le tir de 17 460 oiseaux pour la saison.

Au vrai, il importe de préciser que ce magnifique migrateur – passé de ‘‘préoccupation mineure’’ à ‘‘vulnérable’’ dès 2015 sur la liste rouge de l’UICN – subit un véritable effondrement numérique : à l’échelle de l’Europe, en l’espace de quatre décennies, sa population aurait diminué de 80 %. Les causes ? Elles sont multiples : intensification de l’agriculture, réduction du nombre de haies et de jachères, amenuisement des zones d’hivernage en Afrique de l’Ouest, braconnage mais aussi pression cynégétique excessive au-delà de la Méditerranée, etc. Certainement cette situation n’est-elle pas d’abord imputable à la chasse française. Cependant,
comment le fait que les prélèvements réalisés sur notre sol ne soient pas la cause de la diminution des populations de tourterelles pourrait- il justifier que l’on continue de les tirer ? S’il est vrai qu’il faut être extrêmement vigilant face aux multiples attaques que nous – chasseurs – essuyons aujourd’hui, le ‘‘cas’’ de la tourterelle des bois n’était-il pas plutôt l’occasion, pour nous, de montrer que le principe de gestion adaptative des espèces n’est pas un concept vide ?

Il y a 35 ans, Allain Bougrain-Dubourg commençait de livrer une bataille très médiatique contre le tir de la tourterelle des bois dans le Médoc au
mois de mai – pratique qui fut ensuite interdite, non sans raison. En s’obstinant à vouloir conserver cet oiseau dans la liste des espèces chassables, le monde de la chasse française ne prend-il pas le risque de faire de ce migrateur un symbole, un symbole que le président de la LPO ne manquera probablement pas de brandir en toute circonstance ? Autre conséquence, qu’il convient sans doute de ne pas négliger…