À bien des égards, les chiffres des tableaux de grands animaux donnent le vertige. En effet, il semble bien loin le temps où l’on avait fêté – symboliquement – le million de grands animaux tirés dans une saison de chasse. On approche de plus en plus du million et demi, ce qui démontre une impressionnante évolution sur ces dix dernières années, et encore plus au cours des vingt dernières. Pas une espèce n’échappe à cette tendance (mis à part les gibiers de montagne, isards, chamois et mouflons).

On le devine, pour la saison 2018-2019 (la dernière en date à être établie par l’ONCFS et la FNC), la part du lion de ces statistiques revient au sanglier avec un niveau de prélèvements étale d’une année à l’autre de près de 750 000 animaux tirés (trois départements dépassent les 23 000 animaux: le Loir-et-Cher, la Moselle et le Gard). Ce niveau de prélèvement, conséquence d’une forte pression de chasse, va s’accentuer cette année avec la possibilité de chasser le sanglier au mois de mars. Une décision nécessaire car, avec les chaleurs du début de saison, et une chute des feuilles retardée, les conditions pour chasser n’étaient pas idéales, souligne la FNC. Du côté du cerf, les tableaux ont augmenté de 4,6 % pour s’établir à 65 275 animaux. Sept départements dépassent les 2 000 animaux (dont le Cantal, la Savoie, l’Indre-et-Loire, la Haute-Garonne et le Loir-et-Cher), alors même que le nombre d’attributions est en légère baisse. Cette hausse des prélèvements s’explique, selon la FNC, par une politique « volontariste de la pression de chasse,notamment par le tir des biches,liée à une meilleure connaissance des populations.» À titre de comparaison, le tableau des cerfs a été multiplié par deux en vingt ans.

À rebours, les prélèvements de chevreuils sont stables d’une saison à l’autre, avec 580 000 animaux tirés (ils étaient seulement un peu plus de 100 000 il y a trente ans !). Deux départements affichent plus de 15 000 animaux tirés (Moselle et Dordogne). Ce n’est qu’une moyenne, car des régions ont vu une baisse des prélèvements, « sans doute due à la canicule qui a affaibli les chevrettes, engendrant une moindre reproduction » (FNC). Y a-t-il trop de grands animaux? C’est l’avis d’associations forestières privées (dont le CRPF) et publiques (dont l’ONF) qui, dans une lettre adressée début janvier au ministre de la Transition écologique, ont demandé une pression de chasse renforcée sur ces trois espèces, particulièrement sur le chevreuil, pression qui passerait par la fin du plan de chasse. La demande n’est pas nouvelle, mais si elle venait à aboutir (il n’en est pas question pour le moment), cela reviendrait à casser un remarquable outil de gestion. Dans ce cas, il vaut mieux demander une hausse du plan de chasse, plutôt qu’instaurer une anarchie qui décrédibiliserait le monde cynégétique.