Le braconnage ! Voilà un sujet qui n’en finit pas de soulever la polémique par les mystères qu’il revêt et les interdits qu’il transgresse.
Il y a quelques mois un documentaire d’Enquête exclusive (mélangeant le braconnage d’animaux domestiques et d’animaux sauvages…) diffusé sur M6, reparlait du phénomène avec si peu de clairvoyance que le téléspectateur ne pouvait se faire qu’une vague idée de la question. Avec, qui plus est,une certaine empathie pour les raboliots des temps modernes.

Au-delà des clichés, qu’est-ce que représente le braconnage aujourd’hui ? La difficulté commence par sa définition même puisque le terme n’apparaît pas tel quel dans le code de l’environnement ; il concerne aussi bien la chasse sur le terrain d’autrui que la chasse à l’aide de moyens et d’engins prohibés…Selon les statistiques établies par l’ONCFS et la gendarmerie, ce sont environ 18 500 infractions qui ont été constatées, dont la moitié relève de la seule police de la chasse (les autres infractions concernent notamment la police de l’eau ou de l’environnement). Sur ces 9000-9500 infractions, « on peut estimer qu’entre 1000 et 1300 sont des actes de délinquance »,constate Hubert Géant, directeur de la Police à l’ONCFS. Une délinquance qui touche la chasse de nuit, avec des moyens interdits,en réunion ou non (133 infractions), la destruction et trafic d’espèces protégées (369 infractions)…

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, « le nombre d’affaires de braconnage n’est pas en augmentation, poursuit Hubert Géant, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas une évolution ». En effet, avec la raréfaction du petit gibier et l’explosion des populations de grands animaux, les braconniers se sont “naturellement” dirigés vers les “grosses bêtes”. Les lieux ont aussi évolué : il y a une génération, le braconnage des cerfs, sangliers et chevreuils se concentrait dans l’est et le centre de la France. « Maintenant, il n’y a guère de régions épargnées », souligne l’ONCFS. Évolution encore en matière d’organisation: si le braconnage en équipe a toujours existé, il ne disposait pas de grands moyens. Aujourd’hui, l’ONCFS et la gendarmerie ont affaire à des filières, bien armées, disposant de chambres froides, qui préparent la viande sous vide et la proposent à des prix imbattables (un euro le kilo de sanglier et 2 euros pour le chevreuil !).

Difficile de ne pas dire aussi que ces braconniers trouvent une clientèle parce que l’offre de venaison sur les marchés est faible, en raison de normes sanitaires draconiennes. On est loin des collets du héros de Maurice Genevoix… Les enquêtes menées par l’ONCFS et la gendarmerie sont souvent longues, nécessitent filatures et écoutes téléphoniques (la législation a été modifiée en ce sens, puisque ces services ne pouvaient auparavant qu’intervenir sur flagrant délit). Autre évolution qui concerne cette fois le trafic d’espèces protégées, le“cyber-braconnage” : les autorités doivent en effet maintenant pister sur la Toile les collectionneurs qui sont à la recherche de la pièce ou de l’animal rare.

En revanche – et contrairement à ce que laissait supposer le reportage de M6 –, pour l’ONCFS, « rien ne permet de penser que la crise économique accentue les actes de braconnage ».