Élu à l’unanimité président de la Société de Vénerie, au mois de mai dernier, Pierre-François Prioux prend la suite de Pierre de Roüalle, qui a désiré mettre fin à ses fonctions après douze ans de mandat bien remplis. À l’instar de son prédécesseur, le nouveau chef de file des veneurs, maître d’équipage du Rallye Tempête depuis sa création en 1988, découple dans la voie du chevreuil, mais il est l’un des premiers présidents à avoir créé son propre équipage. Passionnée de chasse aux chiens courants, la famille Prioux – Pierre-François, son épouse Marie-Hélène et leurs enfants – s’est investie corps et âme dans la chasse à courre, y sacrifiant leurs vacances, leur temps et leur argent, depuis des décennies. Du Rallye Tempête, devenu l’un des meilleurs équipages de chevreuil en France, on peut dire qu’il a contribué à démocratiser la vénerie, facilitant son accès à de nouveaux venus qui n’en avaient ni la connaissance ni les moyens. À l’instar de Pierre de Roüalle, le nouveau président est un homme de communication et de dialogue. À la fois maire de sa commune et enseignant, professeur d’histoire-géographie, il a été pendant quinze ans délégué régional de la vénerie pour la région Centre-Île-de-France. Autant dire qu’il est parfaitement instruit des dossiers et conscient des enjeux et des problèmes
auxquels il devra se mesurer dans une conjoncture difficile.
Car d’année en année la situation se complique pour la vénerie, cible de choix des antichasse, des tenants du bien-être animal, et des diverses mouvances de l’écologie, qui réclament à cor et à cri son interdiction depuis de nombreuses années. Arguments invoqués : il s’agit d’un mode de chasse rétrograde et cruel, rappelant fâcheusement les privilèges d’un Ancien Régime auquel la Révolution a heureusement mis fin, et, de surcroît, inefficace sur le plan de la régulation des espèces.
À partir d’informations erronées ou biaisées, de faits déformés, d’images manipulées, une minorité de militants agressifs, plus acharnés à interdire qu’à protéger, est parvenue, grâce aux réseaux sociaux, notamment, à diffuser assez largement leur idéologie auprès d’un public crédule et mal informé, à qui ils font accroire que ‘‘tuer Bambi’’ relèverait presque d’un crime contre l’humanité.
Pour Pierre-François Prioux, le défi « est de faire comprendre que la vénerie n’est pas seulement un héritage des temps anciens, mais que ce mode de chasse, le plus conforme à l’écologie, s’inscrit dans la modernité, qu’il est non seulement légitime mais qu’il est aussi utile à la biodiversité. Il est donc vital de communiquer pour dissiper les idées fausses et les clichés dont est victime la chasse à courre. On ne va pas se contenter de subir, on va prendre les devants et développer nos arguments. Au sein de la Société de Vénerie, il n’y a pas de tensions, et, de la petite à la grande vénerie, tout le monde s’entend bien. Maintenant, il nous faut mener nos actions en concertation avec la FNC, dont le président, Willy Schraen, est solidaire de notre mode de chasse, et, plus largement, avec l’ensemble du monde rural, dont nous partageons les intérêts et les soucis ».
Dans une société qui évolue de plus en plus vite, le défi de la vénerie du XXIe siècle est de prouver qu’elle est capable de s’adapter à un environnement changeant et contraignant, si ce n’est hostile, et de se montrer exemplaire quant à l’éthique de chasse.
Ainsi, durant l’été, au cours d’une réunion des maîtres d’équipage de cerfs,
des décisions ont été prises à cet égard : arrêter systématiquement les chiens dès lors que l’animal de chasse pénètre dans un village, ne pas servir les cerfs chassés avant la fin du brame, créer des zones de non-chasse dans des forêts périurbaines comme Rambouillet, Compiègne, Chantilly. « Nous voulons montrer, martèle Pierre-François Prioux, que la vénerie sait prendre les mesures nécessaires en matière de rigueur et de discipline, fût-ce à ses dépens ». Reste une incertitude : quelle sera l’attitude, jusque-là ambigüe, du milieu politique et des ministres de tutelle ? À défaut de soutien – dont Emmanuel Macron fit preuve lors de son précédent mandat –, Pierre-François Prioux attend, pour le moins, qu’ils s’obligent à la neutralité et ne prennent de décisions qu’en toute connaissance de cause : « J’espère qu’ils ne céderont pas à la politique partisane, et que le bon sens et la réalité du terrain prévaudront. La vénerie reste ancrée dans le paysage rural français et doit perdurer ».