C’est une décision de justice qui est un peu passée inaperçue – jusqu’à présent – dans le monde cynégétique. Chacun se souvient qu’en septembre 2018, la FNC avait lancé une vaste campagne de communication destinée à rappeler à l’opinion que les chasseurs jouent un rôle important – sinon essentiel – dans le maintien de la biodiversité et, plus généralement, dans l’entretien des espaces naturels en France. Dans ce cadre, des affiches avaient été placardées dans les lieux publics – notamment dans le métro parisien –, et des visuels avaient été diffusés dans la presse et sur Internet, qui portaient ce slogan : les chasseurs sont « les premiers écologistes de France ».

Las, comme on pouvait s’y attendre, la campagne n’avait pas à l’époque emporté l’adhésion de tous, tant s’en faut. Suivant l’avis de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, laquelle soulignait que ledit slogan ne s’appuyait pas sur des « éléments justificatifs objectifs et vérifiables », la RATP contraignit purement et simplement la FNC à ajouter un point d’interrogation à la fin du syntagme : l’affirmatif « premiers écologistes de France » se dégradait en un plat et énigmatique « premiers écologistes de France ? » – perdant ainsi, à l’évidence, sa force et son intention originelles.

Mais les mauvaises nouvelles – comme les bonnes, dit-on – n’arrivant jamais seules, voici que la FNC subit un second revers, après que la LPO eut obtenu gain de cause auprès du Tribunal Judiciaire de Paris qui, le 12 février 2021, condamna solidairement et la FNC et l’agence SA Marketing Publicité 2000 pour « parasitisme » à son égard (5000 euros au titre du préjudice moral et 5000 euros au titre des frais de justice).

Parasitisme ? Pour le dire d’un mot, certains visuels de la campagne avaient été jugés trop ‘‘proches’’ ou trop ‘‘inspirés’’ de la charte graphique de la LPO, laquelle bénéficie d’un droit de propriété intellectuelle protégée. Naturellement, la FNC a fait appel de ce jugement et, le 2 décembre dernier, la cour d’Appel de Paris lui a interdit d’utiliser ou de reproduire les affiches concernées – au nombre de trois – ainsi que la charte graphique de l’association « sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit », ordonnant également leur retrait de son site Internet, et condamnant les chasseurs à verser 10 000 euros à la LPO. De fait, Allain Bougrain-Dubourg n’a pas manqué de fanfaronner : « Pollution par le plomb, destruction d’espèces en mauvais état de conservation, combats contre la création d’espaces protégés, relâchés de gibiers d’élevage, destruction des petits prédateurs alliés de l’agriculture… Après un tel palmarès, les chasseurs voudraient faire croire qu’ils sont les premiers écologistes de France, qui plus est en plagiant la LPO. La justice vient de tourner la page de cette tartufferie »

Il n’y a pourtant pas là de quoi jouer les fiers-à-bras. Car si l’on examine de près la décision de la cour d’Appel, la FNC est bien loin d’une défaite ou d’une « tartufferie ». L’affaire est, en effet, bien plus nuancée que la LPO voudrait nous le faire croire. L’association ornithologique s’est bien gardée de dire que la notion de « parasitisme » avait été écartée par l’instance judiciaire, ne gardant que la « contrefaçon ». Qualification que la FNC conteste toujours, au motif qu’utiliser certaines couleurs (dont le vert) et des oiseaux sur des affiches ne sont pas la propriété exclusive de la LPO. Pour cette raison, la FNC se réserve le droit de se pourvoir en cassation.

Plus encore, ce que se garde bien de dire la LPO, c’est qu’une plainte en diffamation est toujours en cours. Rappelons-nous, en effet, que l’association présidée par Allain Bougrain-Dubourg avait détourné sur son site Internet les affiches de la FNC, en les caricaturant, voire en injuriant les chasseurs. La FNC avait aussitôt porté plainte pour diffamation contre le directeur général de l’époque de la LPO, Yves Verilhac, qui a été mis en examen. L’affaire est maintenant devant le tribunal correctionnel de Paris. La confrontation entre les deux parties devrait intervenir à la fin de 2023.

Au vrai, ces affaires illustrent, une fois encore, le fait que la LPO n’admet pas qu’elle ait été créée par des chasseurs et que la FNC ait été reconnue comme acteur de la biodiversité par le loi du 24 juillet 2019. D’où des campagnes de dénigrement tous azimuts. Bref, le conflit n’est pas prêt de s’éteindre.