Comme pour un grand cru, un portefeuille nécessite une allocation d’actifs diversifiée et une bonne dose de conviction. L’expertise de Cyril Bergé, président-fondateur de Clay Asset Management.

Vous êtes un spécialiste de la gestion de fortune ; quels sont les facteurs clés qui permettent de faire fructifier un patrimoine ?

Lorsque j’ai créé Clay Asset Management, partant d’une page blanche et de
mon expérience passée, je suis arrivé à la conclusion que pour réussir à faire fructifier un patrimoine, il était primordial de le diversifier (par types d’actifs, par zones géographiques), s’entourer d’interlocuteurs compétents, transparents sur leurs modes de rémunération, investir dans des choses simples que l’on comprend et s’assurer qu’une majeure partie du patrimoine est accessible à tout moment, donnant la capacité de s’adapter au fil du temps. Dit de manière plus schématique, il faut arriver à combiner des solutions de gestion dont l'objectif est une rentabilité modérée avec, comme corollaire, la préservation du capital (gestion d'actifs liquides se caractérisant par leur disponibilité à tout moment) et des solutions dont l'objectif est la création de richesse (Private Equity, immobilier…) mais dont la contrepartie d'un rendement plus important est son absence de liquidité sur longue période.

◆ Comment y parvenir, concrètement ?

J’ai volontairement limité le périmètre d’intervention de la société aux seuls actifs liquides car un gestionnaire de fortune doit commencer par définir les limites de son champ d’intervention. Le Private Equity, l’immobilier… sont des classes d’actifs sur lesquelles nous n’intervenons pas aujourd’hui. L’ADN de Clay Asset Management, c’est l’allocation d’actifs et une bonne dose de conviction. Notre palette d’investissement est volontairement étendue : nous pratiquons très largement la multigestion avec une vision d’investissement globale et une gestion obligataire, avec des titres en direct, effectuée en interne. Cette dernière solution est particulièrement adaptée aux trésoreries de holdings patrimoniales.

◆ En gestion de fortune, c'est l'horizon de long terme qui compte ; les marchés boursiers sont-ils actuellement trop chers ?

Nous devons être capables, en tant que gérants financiers, de délivrer de la performance tout en gardant en tête que les fonds peuvent être rachetés à tout moment et ce, pour des causes diverses (donation, décès, investissement personnel, modification du train de vie, etc.). Accéder à la liquidité à tout moment n’a pas de prix, et je regrette que les investisseurs particuliers n’en prennent pas suffisamment conscience, surtout en cette période de taux bas où, finalement, les performances des portefeuilles diversifiés restent solides. Quand je vois les montants investis dans le Private Equity ou l’immobilier et certaines valorisations, je me dis qu’à 10 ans, le match n’est peut-être pas complètement joué et que la performance de certains actifs liquides pourrait agréablement surprendre, tout en offrant le sésame de la disponibilité à tout moment ! Enfin, si la valorisation absolue est élevée, les actions restent très attractives, comparées aux autres actifs liquides.

◆ La France s'est enfoncée en territoire de taux négatifs, entraînant une baisse des rendements de l'assurance vie. Faut-il abandonner le fonds euros ?

L’ADN des Français est très éloignée de la prise de risque, mais, à moyen terme, les lignes devraient bouger, car la problématique de taux bas, si elle se posait déjà ces deux dernières années, sera encore plus forte en 2020 et les années suivantes. Les grandes manœuvres ont déjà commencé pour que le fonds en euros ne soit plus en tête de gondole dans l’offre des gestionnaires. Il y a maintenant plus de 8 ans, au démarrage de la société, mon idée était d’offrir des solutions de gestion qui soient une alternative au fonds en euros déjà bien représenté dans le patrimoine des personnes fortunées et dans les actifs des holdings patrimoniales, car je pensais, déjà, à cette époque, sa fin proche. Si le succès a été total, côté timing (ce qui est toujours gênant pour un gérant !), j’avais 4 ans d’avance.