L’opposition contemporaine à la chasse doit être examinée dans une perspective de remises en cause beaucoup plus large que jadis. Il y a quelques années encore, les ‘‘défenseurs des bêtes’’ se contentaient peu ou
prou d’essayer de réduire la cynégétique à l’assouvissement d’une pulsion sadique ; aujourd’hui, la constellation antichasse est en train de se doter d’une structure idéologique à la fois nettement plus solide et dangereuse,
gangrénée et nourrie qu’elle est par la montée en puissance des thèses antispécistes et des préceptes de vie issus du véganisme. Il ne s’agit donc plus seulement, pour ces tenants de la lutte contre la souffrance animale, de disqualifier par l’émotion la chasse passion ou la chasse tout court, mais
d’imposer un ordre nouveau au sein duquel tous les rapports ancestraux homme/animal ou homme/nature seront redéfinis, réinventés – avec, évidemment, les multiples conséquences anthropologiques, écologiques,
morales et économiques qu’un tel bouleversement impliquerait. Or, c’est à cette lame de fond extrêmement préoccupante que notre ami Charles-Henri Bachelier s’est efforcé de s’attaquer dans Les Nouveau Prédateurs, ouvrage sensiblement militant qui a le mérite de vulgariser, en quelque sorte, les enjeux relatifs à la révolution radicale que d’aucuns appellent de leurs vœux pour libérer partout le Vivant des griffes et de la domination de l’homme. À cette fin, l’auteur s’inspire abondamment – et à juste titre – des critiques développées ces dernières années (par Jean-Pierre Digard, Gilles Luneau, Alain Finkielkraut, etc.) à l’encontre des partisans de l’antispécisme, « essay[ant], comme il l’écrit lui-même, de prendre un peu de hauteur et […] d’éclairer modestement le débat ». Puis de préciser : « Ces
militants jusqu’au-boutistes sont les nouveaux prédateurs. Ils souhaitent en finir avec la place si spéciale de l’homme dans son environnement. Une rupture civilisationnelle qu’il me semble capital de dénoncer et de contrecarrer ».
Le Cherche Midi, 160 pages, 16 €.