« Chasser sans chien ? Peut-on considérer cela comme de la chasse ? », avait écrit, un brin provocateur, Paul Vialar. Notre ami Thierry Delefosse le pense et le revendique haut et fort, sans posture, ni apprêts (« Chasser sans chien, c’est… Je ne sais pas ce que c’est, mais pas la chasse que j’aime. Je me sens très seul »). Témoin, sa dernière livraison, où il nous offre – rehaussé par des aquarelles et dessins de Dominique Pizon – un dialogue savoureux, plein de vérité et d’émotion avec ses chiens Rumba, Dauphine, Jocker… qu’ils soient kor-thals ou springers, mais sans jamais tomber dans un anthropomorphisme de mauvais aloi, si courant de nos jours. Avec force anecdotes, souvent tou-chantes et drôles, au fil d’une écriture sans fard, même si l’on peut regretter quelques longueurs, l’ensemble est enlevé. Nous chassons dans ce pays du Nord, si cher à l’auteur, de mystérieux canards, de trop rares perdrix, et d’en-voûtantes bécasses. Nous voyageons avec Genevoix, Vincenot, Pagnol, Déon, Moinot… Les chiens sont là, avec leurs drames et leurs tourments, avec cette extraordinaire complicité qu’ils apportent à leur maître. Une relation forte, mais si courte. Quel chasseur ne craint pas « le déchirement qui se profile » ? Et de défendre avec vigueur et raison, auprès de l’opinion publique, « l’image éminemment sympathique du chasseur avec son chien », ce qui n’est pas assez fait, regrette-t-il en substance. Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que ses chiens font viscéralement partie de sa vie. D’ailleurs, n’espère-t-il pas « qu’à son tour, au moment de quitter ce bas monde, si la mort lui laisse quelques instants de répit, il verra, parmi les êtres chers qu’il a connus, gambader, joyeux, ses chiens de chasse » ?
Versicolor Éditions, 239 pages, 25 €.