La bibliothèque d’un pavillon de chasse

Le Pavillon de chasse ! Le rêve du chasseur ! Un lieu pour partager sa passion avec ses amis, un lieu pour se ressourcer. Qu’il soit modeste ou somptueux, de la cabane de montagne au château royal, le pavillon de chasse est avant tout le lieu de la communion autour de la faune et de la nature sauvage. Le chasseur s’y prépare le matin, il s’y repose après la chasse. Il y partage la chère et le vin pour célébrer la réussite d’un beau tableau, la conquête d’un beau trophée ou pour y noyer la malchance d’un tir raté. Dans l’antre du relais de chasse, quoi de plus naturel que d’accrocher les trophées qui rappellent tant de souvenirs, et d’ajouter peintures de gibier, bronzes animaliers et objets de chasse chinés dans les brocantes ? Une place de choix sera faite à la bibliothèque. Quel bonheur simple mais riche de volupté que de prendre un livre, au coin du feu ou du poêle, et de s’évader en relisant les bons auteurs cynégétiques !

La bibliothèque du relais de chasse de M. Christian V***, en Picardie, dispersée à Drouot en mai dernier, donne une bonne idée du plaisir que les livres de chasse procurent. Certains faisaient déjà partie de la bibliothèque
de son père, chasseur lui aussi, mais il avait acheté la plus grande partie d’entre eux chez les libraires spécialisés ou lors de la dispersion aux enchères de bibliothèques formées par d’autres chasseurs. Parmi les 1600 volumes, dont 400 que M. V*** avait fait relier, on trouve des classiques des XIXe et XXe siècles (Blaze, Foudras, Oberthür, Villatte des Prugnes, Lurkin, Witt, etc.), des ouvrages illustrés par Poret, Oberthür, Reille, Riab, Danchin, Hallo ou Poortvliet, des traités techniques ou sur les chiens, des récits de chasse en Afrique, des souvenirs de vénerie, des albums modernes, et même des livres de pêche ! Comme toutes les bibliothèques, celle-ci révèle la personnalité de son propriétaire, ses goûts et ses choix. Ainsi, M. V*** avait eu la bonne idée de demander à son relieur de couvrir de basane (de la peau de mouton) verte ses ouvrages de vénerie, de basane brune les livres de chasse à tir en France ou à l’étranger, et de basane bleue ceux concernant la pêche et les poissons.

Constituée au fil d’une vie, la bibliothèque d’un chasseur est toujours le témoin de souvenirs, de voyages, de cadeaux, d’amitiés, d’une curiosité pour tel type de chasse ou tel gibier. Parfois ornés d’un ex-libris (c’était le cas de ceux de la bibliothèque de M. V***, dont les ex-libris étaient illustrés d’un sanglier courant ou de deux bécassines), les livres de chasse permettent aussi l’initiation et la transmission des valeurs aux générations à venir. Quelle joie de feuilleter un bel album avec un enfant pour lui faire découvrir les merveilles d’un artiste animalier ! Enfin, la richesse d’une bibliothèque n’est pas dans le nombre de livres accumulés sur les rayonnages, mais dans l’émotion que chaque ouvrage suscite, dans le bien qu’apporte un texte, dans la connaissance qu’un manuel procure. Lire est bon pour l’esprit et pour le bonheur ! À consommer sans modération !