Certains scientifiques estiment que les incendies subis par notre pays cet été ont battu des ‘‘records’’ : surfaces brûlées, intensité et vitesse de propagation du feu, durée. Ce qui est sûr, c’est qu’à l’heure où nous rédigeons ces lignes, plus de 62 000 hectares sont partis en fumée depuis le début de l’année, contre 8500 en moyenne, chaque année, entre 2006 et 2021. Si les départements du Sud-Est sont fréquemment victimes d’incendies en cette saison, on observe que la Bretagne, les Vosges ou le Jura par exemple n’ont pas été épargnés et, surtout, qu’il revient à la Gironde de remporter la triste palme des destructions les plus importantes, avec plus de 26 700 hectares de forêt calcinés. Un drame, d’abord, pour les habitants qui ont vu leur propriété réduite en cendres, un drame pour les sylviculteurs et ceux qui vivent, dans ces régions, de la filière bois ou de l’agriculture, mais un drame, aussi, pour les animaux sauvages, ainsi que pour les chasseurs locaux, lesquels, cela a été abondamment relayé dans les
médias, ont été très actifs aux côtés des ‘‘soldats du feu’’. « S’agissant du grand gibier et de la microfaune, nous n’avons pas encore assez de recul pour estimer la nature des conséquences, tempère Guillaume Desenfant, directeur de la communication de la FDC de Gironde. Nous effectuons des comptages, posons des caméras nocturnes. Les sangliers sont déjà de retour sur certains territoires. Au reste, beaucoup de zones ne peuvent plus être
chassées. C’est la raison pour laquelle nous sollicitons les nemrods d’autres départements afin qu’ils puissent accueillir ceux qui n’ont aujourd’hui plus
où chasser… » En tout état de cause, quelles que soient leurs origines (criminelles, etc.), ces ‘‘catastrophes’’ – dont d’aucuns prédisent la récurrence et l’aggravation – devraient légitimement nous conduire à réfléchir aux aménagements, aux usages et aux modes de production qui sont les nôtres relativement à la forêt. À ce sujet, dans un récent texte publié sur son compte Facebook, l’anthropologue Charles Stépanoff (auteur de l’excellent L’Animal et la mort en 2021 ; La Découverte) mentionne une étude américaine publiée en 2021 dans la revue scientifique PNAS, et, plaidant en faveur du « pâturage extensif » mais aussi des « techniques traditionnelles de brûlis », commente : « Les chercheurs y démontrent
que les feux réguliers menés par les communautés autochtones ont pour effet de former des mosaïques paysagères favorables à la biodiversité. Une végétation adaptée aux feux s'installe. Quand cette gestion traditionnelle est supprimée, se met en place un régime de feu à cycle plus long, sous forme d'incendies sévères aux effets dramatiques pour la biodiversité ». Sans doute à méditer…