« Chasseurs, sauvez des vies. Restez chez vous » : placardés sur 1500 panneaux répartis dans tout l’Hexagone le 30 mars (et pour une durée de deux semaines), ces mots sont ceux que la fondation Brigitte Bardot a choisis pour, une fois de plus, faire œuvre de propagande antichasse – pardon : introduire dans le ‘‘débat public’’ l’idée que la chasse est une activité dangereuse, essentiellement meurtrière, « menée par une minorité [qui] dérange une majorité de Français », selon Christophe Marie, directeur adjoint de la fondation, laquelle s’appuie, en outre, sur un récent sondage qu’elle a elle-même commandé auprès de l’Ifop pour avancer que 78 % de nos concitoyens seraient favorables au dimanche sans chasse. Sondages, techniques de communication, racolage par l’image et, par conséquent, gros investissements pour rallier l’opinion de force : l’heure n’est plus, hélas, à la confrontation d’arguments, mais bien plutôt au martelage et à la course à la visibilité. De fait, du côté de la FNC, décision a manifestement été prise de suivre cette voie-là. En effet, après avoir également commandé à l’Ifop un sondage qui laisse entendre que « plus les Français connaissent la chasse, plus ils y sont favorables », la fédération a aussi lancé une campagne pour défendre notre passion, cette fois sous la forme de deux petits films, l’un de trois minutes – diffusé sur Internet –, l’autre de 30 secondes, diffusé sur une quinzaine de chaînes des groupes TF1, M6 et Canal+ (sauf BFM TV), du 27 avril au 24 mai, et aux heures de grande écoute.
Dans ce dernier spot, illustré d’un extrait de la célèbre chanson C’est si bon, on voit des chasseurs – hommes, femmes et enfants –, non des acteurs, partager quelques instants d’avant ou d’après chasse, sourire aux lèvres et joie au cœur. Ici, point d’armes ni d’animaux tués, ainsi que l’exige l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité. Toutes chaînes TV confondues, 1200 passages ont été programmés ; quant au service public, la fédération s’est heurtée à un refus. Noyautage idéologique ? « Il est dans son droit, nous répond Emmanuel Blac-que-Belair, directeur de la communication de la FNC, car il s’agit d’un sujet dit ‘‘sensible’’. » Dont acte. Naturellement, une question se pose : combien cette campagne de grande ampleur a-t-elle coûté ? « Nous ne souhaitons pas nous exprimer sur ce sujet, précise Emmanuel Blacque-Belair. Il s’agit en tout cas du plus gros investissement jamais consenti par la FNC en matière de communication… » 4, 5, 6 millions d’euros ? Plus ? Nous n’en saurons pas davantage. Libre à chacun d’apprécier la qualité et la pertinence de ce film, l’intention étant en quelque sorte résumée dans le slogan qui apparaît à sa fin : « La chasse, le bonheur grandeur nature ». On peut toutefois se demander si les retombées seront vraiment à la hauteur de l’engagement financier : puisque, règlementation oblige, nul acte de chasse n’a pu y être montré, nos détracteurs ont déjà beau jeu de crier au mensonge publicitaire, et d’indiquer qu’une fois encore le ‘‘puissant et riche lobby’’ des chasseurs tente d’acheter les consciences. Quant aux téléspectateurs ‘‘ni pour, ni contre’’, lesquels constituent la véritable cible, seront-ils sensibles au déluge de convivialité qui paraît être le fil conducteur de ce spot, et qui est censé… symboliser la chasse ?