L’Association nationale des chasseurs de grand gibier (ANCGG) fête ses 70 ans. Pas un de ses créateurs n’aurait pu imaginer qu'elle acquerrait au fil des ans un tel poids et un tel rôle dans la chasse française. Souvenons-nous. C’était au lendemain de la Seconde Guerre mondiale : quelques chasseurs, au premier rang desquels François Sommer, Claude Hettier de Boislambert (tous deux compagnons de la Libération) mais aussi maître Floriot, Robert Flament-Hennebique, Bernard de Billy, Fernand Verdeille (sénateur du Tarn, et inspirateur de la loi sur les ACCA), impressionnés par la gestion germanique des grands animaux (ils avaient chassé dans les forêts rhénanes) et l’anarchie qui régnait en France sur ce sujet, décidèrent de créer l’ASCGG (Association sportive des chasseurs de grand gibier), qui deviendra plus tard l’ANCGG, pour en faire une sorte de club de gens influents, club susceptible de peser sur les pouvoirs publics. Rappelons-nous qu’à cette époque, la chasse faisait partie de l’ordre naturel des choses et que François Sommer et Claude Hettier de Boislambert, gaullistes historiques, comptaient dans la vie publique, le premier par sa carrière d’industriel, le second par sa carrière politique…
Toute leur démarche sera de faciliter d’abord une chasse sélective, ce qui revient à offrir plus de chance à telle ou telle espèce de se développer. Se battant sans relâche, ils obtiennent l’autorisation du tir d’été du brocard. Puis ce sera le fameux plan de chasse – auquel s’opposeront de nombreuses fédérations de chasse, jalouses de ses prérogatives, et qui sera confronté à l’inertie de l’administration –, pour en finir avec la chasse-récolte chère au XIXe siècle. Lancé en 1951 sur quelques territoires domaniaux, puis au niveau national en 1963 – mais à titre facultatif –, il sera généralisé en 1978 avec le succès qu’on lui connaît. Plus tard, en 1991, l’ANCGG mettra en place le brevet grand gibier (près de 15 000 brevetés à ce jour), et publiera un livre qui fait toujours référence (Le Grand gibier, la chasse, les espèces, la gestion).
Avec le recul, et à travers ses présidents successifs – François Junk, André-Jacques Hettier de Boislambert (le fils de Claude), le Dr Alain François puis, aujourd’hui, Gérard Bédarida –, cette institution (plus de 8 000 membres actifs) est assurément restée fidèle à ses créateurs. Les défis, à présent, sont immenses : « Trouver un équilibre forêt, agriculture et grande faune, changer certaines mentalités [comme l’agrainage artificiel], mettre en valeur la notion même de chasse. Une question de temps et de patience », comme l’explique son président. C’est bien là toute la différence, par rapport à il y a 70 ans : la chasse n’est plus une évidence. Ce qui renforce l’importance du rôle de l’ANCGG.